En marge de la première journée de PRO A Dame, qui s'est déroulée le 14 septembre 2025 et qui a vu le St Denis Tennis de table 93 s’imposer 3 à 1 face l’équipe du Mans Sarthe, l’équipe de « Parole champ’s » a pu rencontrer et échanger avec la pongiste Prithika Pavade. Un échange autour de son parcours, ses objectifs et ses projets

PROPOS RECueilli LE 14 SEPTEMBRE 2025- Steven pour LBS FM

 Pourriez-vous vous présenter succinctement pour ceux quine vous connaissent pas ?

Prithika Pavade, 21 ans. Je suis pongiste, membre del’équipe de France et classée dans le Top 30 mondial.

Depuis combien d’année pratiquez-vous le tennis de table ?

J’ai débuté à l’âge de 7 ans au sein du club du Bourget et entame ma 11ème année au sein du club de Saint Denis.

Combien de temps consacrez-vous en moyenne à la pratique du tennis de table ?

La majorité de mon temps est consacré à la pratique de mon sport. Je m’entraine au travail technique et physique 25 heures sur une semaine pleine, auquel il faut ajouter les matchs, les compétitions, les stages, etc.. avec en réalité des temps de coupure assez réduits. Ma vie est majoritairement consacrée et organisée autour de la pratique du tennis de table.

Quelle est la journée type d’un entrainement ?

L’entrainement débute à 9h30. J’y suis habituellement pour 9h. La première demi-heure est consacrée à l’échauffement physique, puis démarre la séance de jeu technique jusqu’à 12h.Nous avons une séance quotidienne dédiée au travail physique programmable à 12h ou en soirée. Si elle est planifiée à 12h, elle s’achève entre13h et 13h30 en fonction du programme. S’ensuit la pause déjeuner puis une sieste : elle est primordiale pour moi (Rire).L’après-midi, nous reprenons à 15h30 sur les mêmes bases.

Sur le volet technique, avez-vous un programme qui vous est dédié spécifiquement ? Prenez-vous par moment l’initiative de proposer des séances sur le travail technique ou encore sur les aspects stratégiques ?Comment se passe la relation à ce niveau avec votre coach ?

Il est important que le joueur soit au cœur de son projet jeu. C’est une discussion avec le coach. Par exemple, Il est possible sur un cycle de 3 mois, de définir 3 ou 4 axes de travail. Le tennis de table est intéressant car il offre une très grande variété d’exercices. Nous nous accordons sur une période d’entrainement puis le travail démarre.

La data et la vidéo sont-elles utilisées pour la préparation des matchs ?

Oui complètement. Je pense que nous avons démarré assez tôt en France. Depuis que je suis cadette voire junior(13-14 ans), j’analysais systématiquement la veille mon adversaire en vidéo s’il existait des vidéos. Aujourd’hui des outils permettent d’obtenir des données ultraprécises comme la répartition chiffrée des zones de la table dans lesquelles les services atterrissent. Si la data me plaît, je préfère mieux l’analyse « basique »qui consiste à visionner simplement la vidéo avec étude des différents points que me sont transmis. Aujourd’hui les outils sont très sophistiqués et peuvent produire des données vraiment très détaillées.

Avez-vous à proprement parlé des séances dédiées à l’analyse vidéo et des données statistiques ? Ou s’agit-il plutôt d’analyses effectuées à des moments précis à votre convenance ?

Nous n’avons pas de séances spécifiques dédiées à l’analyse vidéo. Il s’agit plutôt d’un travail individuel effectué lors des préparations de matchs. Il est également possible de filmer nos séances d’entrainements mais cette pratique reste assez rare.

Vous êtes aujourd’hui une sportive de haut niveau. Quels sont les aspects agréables et ceux les plus " difficiles " ?

Je me sens très chanceuse de pouvoir faire et de pouvoir vivre, au vue de mon niveau, de ce que j’aime le plus : la pratique du tennis de table. J’adore vraiment ce sport. Avoir la chance quotidiennement de le pratiquer et de me donner les moyens d’effectuer des voyages, des compétitions, pour être la meilleure possible sans vraiment me préoccuper du niveau financier, ect. Chez les filles il faut être classé assez haut dans le classement pour commencer à être rémunérer. Chez les garçons la rémunération débute « un peu plus tôt ». Faire ce que j’aime tous les jours représente une superbe opportunité.

Concernant les moments désagréables, il s’agit des moments difficiles avec la question de leur gestion. Même si j’adore mon sport, il arrive des phases de « moins bien »avec la flamme qui brille un peu moins. Un travail s’amorce alors pour savoir« comment raviver la flamme ». Chez moi elle a plutôt tendance à se rallumer très vite. Mais il arrive par moment que le plaisir soit un peu moins présent. La vie sociale est également fortement diminuée. Même si d’un côté je vis des expériences que les autres n’ont pas l’occasion de vivre, la contrepartie fait que je manque certains évènements : des anniversaires, des soirées ou encore des sorties. En soi, cela me convient car c’est la vie que j’ai décidé de mener mais j’ai conscience de passer également à côté de choses que d’autres ont l’habitude de faire assez simplement.

Comment êtes-vous parvenu à gérer la période l’adolescence avec les exigences sportives ?

Cette période s’est déroulée très vite. Je n’ai jamais été quelqu’un d’extrêmement sociable : je suis assez timide et très introvertie. J’ai toujours eu des amis sans avoir la nécessité d’en avoir une tonne. Ma personnalité fait que j’ai peut-être encaissé plus « facilement » ces exigences. J’ai aujourd’hui dans mon entourage quelques amis d’enfance avec qui j’ai débuté le tennis de table ou avec qui j’étais à l’école primaire. Je fais également des rencontres via la pratique de mon sport. C’est très important d’avoir un bon équilibre. Même sile tennis de table reste ma priorité, il est important d’être épanoui à côté.

La saison s’annonce assez chargée, avez-vous une visibilité sur vos prochaines compétitons jusqu’à la fin d’année ?

Dans 10 jours nous partons en Chine pour le « China Smash ». Les Smash sont l’équivalents des grands chelems au tennis. Il y aura le championnat d’Europe par équipe à la mi-octobre 2025 qui sera une belle étape avec l’objectif de réaliser de grandes choses là-bas. Un certain nombre de compétitions internationales auront également lieu. La période sera en effet assez dense.

Vous évoquiez plus tôt dans l’année avoir eu recours à un préparateur mental ainsi qu’à un psychologue du sport. Pensez-vous que le sujet soit encore tabou dans votre sport ?

Absolument pas. La technique et le physique sont évoqués assez tôt durant la formation. Assez vite il nous est également expliquer l’importance de l’aspect mental qui n’était peut-être pas encore assez travaillé. Aujourd’hui encore ça reste nouveau et il reste forcément des pistes d’amélioration. C’est un domaine important sur lequel moi-même j’ai rencontré des difficultés pour me lancer, car au fond de moi, je me suis toujours dis que j’avais plutôt la tête sur les épaules. C’est un processus qui a pris beaucoup de temps.

Mon entourage a également pris du temps à me convaincre et a poussé ma réflexion : même si on se sent fort à l’intérieur, il est possible de devenir encore plus forte, peut être l’une des meilleures et que ça vaut le coup d’essayer d’appuyer sur cet aspect. Ce n’est pas parce que je possède des habilités sur l’aspect mental qu’il ne faut pas chercher à les améliorer. Il existe également plusieurs autres aspects dans lesquels je ne suis pas très bonne. C’est comme pour tout, Il faut travailler. Néanmoins il faut trouver différentes formes afin de ne pas tomber dans une certaine lourdeur. Le travail mental nécessite énormément d’échanges verbaux ce que je ne trouve pas forcément très simple. Je préfère largement jouer et « être en action » plutôt que de devoir discuter avec une personne.

 Comment parvenez-vous pour à gérer la pression et les attentes ?

Plus jeune je n’éprouvais pas de réelles difficultés à gérer la pression car je restais uniquement concentrée sur mon travail. En grandissant, on commence à entendre certaines choses qui peuvent générer certaines pensées et des doutes. J’ai vécu une période durant laquelle j’ai rencontré des difficultés, pas tant sur la pression en elle-même, mais plus précisément sur la gestion de ce qui pouvait se dire ou que je pouvais entendre à mon propos. Quand tu as été quelqu’un d’énormément observé dans ta jeunesse, les gens se permettent de donner plus facilement leurs avis. Certaines déclarations peuvent être blessantes à entendre ou pas forcément adaptées à la période. Je parviens tout de même à faire abstraction pour rester focus sur mes objectifs à atteindre. Concernant les attentes, je pense mieux les gérer aujourd’hui. Il va m’arriver parfois d’échouer mais ça fait partie du jeu. En réalité le facteur assez contrariant sont les retours qui peuvent être fait par moment. J’essaie de ne pas me focaliser dessus même s’il reste difficile de ne pas entendre ou lire certaines choses.

Quand vous évoquez les« retours », s’agit-il de ce qui peut être lu sur les réseaux sociaux ?

Tout à fait.

Avez-vous des petits rituels d’avant match ?

J’aime bien écouter un peu de musique parfois avant les matchs en fonction des compétitons. Sur certaines d’entre-elles il n’y a malheureusement pas forcément le temps. Souvent après m’être changée, j’aime bien regarder les matchs en cours pour m’imprégner de l’ambiance de la salle. De manière générale, je me prépare physiquement avec mes exercices habituels et j’échange avec mon coach sur la tactique.

 Concernant vos études, vous étiez en première année de licence. Où en êtes-vous actuellement ?

Je suis toujours sur ma première année de licence. J’ai un rythme assez lent en raison de ma pratique sportive et suis totalement en paix avec cela. D’un côté j’ai conscience que le cheminement prendra énormément de temps, et d’un autre, cette souplesse me permet de rester pleinement focaliser sur le tennis de table. C’est important d’être stimuler autrement que par le tennis de table.

Vous avez des sponsors. Comment ça fonctionne ? les sponsors viennent-ils à vous ou adoptez-vous plutôt un travail de prospection ?

ICADE est mon sponsor depuis maintenant 6 ans. L’aventure a débuté par des échanges avec mon entourage qui a abouti à ce partenariat qui perdure jusqu’à maintenant. Parfois tu peux être remarqué via les réseaux sociaux et être contacté. Généralement les contacts sont initiés via le réseautage. Je ne m’en occupe pas personnellement et peux compter sur 2personnes pour développer ce volet. De manière générale, le premier contact s’opère par la transmission aux prospects d’une présentation assez semblable à celle d’un CV.

Arrivez-vous à vivre de votre sport ?

En prenant en compte uniquement mon sponsor équipementier, mon club, et les participations aux compétitions internationales, je peux quand même vivre correctement. Cela est possible car j’ai atteint un très bon classement au niveau mondial et suis joueuse au sein de l’un des meilleurs clubs de France avec lequel nous visons souvent les plus belles places dans les compétions par équipe. Et ce n’est pas toujours évident,notamment chez les filles. Comme je l’évoquais plus tôt, il faut atteindre un certainniveau et être classée parmi les meilleures dans le classement mondial pourpouvoir bien en vivre, ce qui reste malheureusement très difficile d’accès pourle moment.

RMC Sport possède les droits tv et retransmet les grandes compétitions internationales de tennis de table. Le tennis de table a également connu une augmentation significative des licenciés après les JOP 2024. Selon vous comment pourrait-on augmenter la notoriété du tennis de table auprès des jeunes et plus largement du grand public ?

Le tennis de table est devenu assez populaire depuis 2 ans et demi avec forcément la venue d’Alexis et de Felix Lebrun de par leur histoire et leurs résultats exceptionnels. C’était du jamais vu, en tout cas en France : 2 frères classés dans le top 15mondial. Ils ont énormément contribué à l’expansion de notre sport. La couverture du tennis de table proposé par RMC Sport sur les grandes compétitions est géniale, notamment à travers les live Twitch et YouTube qui peuvent plus facilement toucher les jeunes. Je pense que nous sommes sur la bonne voie et n’avons pas grand-chose à envier aux autres pays. En France le tennis de table est de plus en plus mis en avant. Il existe évidemment encore divers moyens pour en parler ce qui n’empêche parallèlement pas le tennis de table de connaître une augmentation significative de son exposition médiatique.

Dans une récente entrevue, vous indiquiez vouloir éventuellement un jour évoluer au sein d’une ligue asiatique. Est-ce que ce projet sportif reste toujours dans coin de votre tête ?

 C’est dans un coin de ma tête. Il faut que mon calendrier s’y apprête car j’ai encore le désir de jouer en France. Je me laisse le temps de grandir. L’année prochaine il est peut-être possible qu’une proposition arrive. Pour ce projet il faut forcément que des propositions me soient faites en ce sens. Quand bien même j’adore voyager, leur nombre est assez conséquent ce qui peut s’avérer épuisant. Même si sportivement ce serait très intéressant, évoluer au sein d’une ligue asiatique signifierait forcément davantage de voyages. Il faudrait étudier et identifier les opportunités, le timing et la période adéquate. Oui, le projet reste bien dans un coin de ma tête.

Quels sont vos objectifs pour la saison à venir ?

 J’aimerais bien forcément réintégrer le top 20 mondial voire plus. Je ne me fixe pas de limite. En soi c’est véritablement par mon niveau de jeu et mes matchs par lesquels je veux franchir des paliers, ce qui se déroule déjà un petit peu : je souhaite remporter des victoires face à des adversaires du Top 10 mondial ainsi que face aux meilleures joueuses évoluant en ligue asiatique. Mon classement avancera si j’obtiens ce type de performance. Avec mon club, ce serait de remporter le championnat de France et la Ligue des Champions. En ligue des champions, nous ne sommes jamais encore parvenues à dépasser la phase de poules, ce qui constitue d’abord notre premier objectif : nous avons une belle équipe et devons avancer étape par étape.

Vous êtes encore très jeune, toutefois avez-vous déjà pensé à l’après-sportif ou cela vous parait-il encore très loin ?

 J’ai déjà réfléchi un peu sur le sujet mais pas au point d’élaborer un projet détaillé. Je ne me vois pas forcément rester dans le tennis de table en tant que coach. Je souhaiterais forcément partager ce que j’ai vécu et le transmettre aux générations futures. De nature curieuse, j’apprécie énormément de sujets, comme par exemple le domaine scientifique dans lequel plusieurs thématiques m’intéressent. Le secteur du sport offre également plusieurs opportunités et peut-être qu’un jour je recevrais une proposition dans le tennis de table qui m’intéressera et que j’accepterai. Je n’ai pas vraiment encore d’idées précises sur le sujet :la carrière d’un pongiste est longue voire très longue.

Quel(s) conseil(s) donneriez-vous à un(e) jeune qui souhaiterait se lancer dans une carrière de joueurs/joueuses professionnel(le) de pongiste ?

Le plus important est de conserver le plaisir, se souvenir des raisons pour lesquelles on a débuté le tennis de table. Bien souvent c’est parce qu’on adore ce sport, la compétition voire pour d’autres raisons. Pour moi Celles-ci constituent le moteur de toute une carrière. Quand bien même j’évolue aujourd’hui à un niveau assez sérieux, je sais que je pratique un bon jeu lorsque je ressens ce plaisir et cette passion que je parviens à retransmettre à la table. Si avec les entrainements, tugravis les échelons progressivement, il est essentiel de garder le plaisir etd’être bien entouré, pour te permettre de perdurer dans le temps.

Le plus important est de conserver le plaisir, se souvenir des raisons pour lesquelles on a débuté le tennis de table. Bien souvent c’est parce qu’on adore ce sport, la compétition voire pour d’autres raisons. Pour moi Celles-ci constituent le moteur de toute une carrière. Quand bien même j’évolue aujourd’hui à un niveau assez sérieux, je sais que je pratique un bon jeu lorsque je ressens ce plaisir et cette passion que je parviens à retransmettre à la table. Si avec les entrainements, tugravis les échelons progressivement, il est essentiel de garder le plaisir etd’être bien entouré, pour te permettre de perdurer dans le temps.

Nous arrivons à la fin de notre entrevue. Avez-vous un message ou une dernière chose à ajouter ?

 Merci pour le soutien

Merci !

Prithika Pavade : Merci d'avoir pris le temps pour notre échange.

Jean Claude Molet (Président du Saint-Denis Tennis de Table) : Merci pour l'accueil chaleureux, votre amabilité et votre disponibilité.

Mehen Poinoosawmy (GIO) : Merci pour la mise en relation avec Monsieur Molet.

Yannis (LBS FM) : Mon binôme toujours opérationnel. Merci pour ta participation à la présentation de cette entrevue.

Nassoudine (Directeur LBS FM) : On t'en demande beaucoup mais tu gères, comme toujours.